Billet n°12 - Du côté de l’éthique académiqueNovembre 2025
Faut-il tout réglementer ? Ce mois-ci, le Comité d’éthique de l’UPPA porte sur la discussion sur les « règles constitutives », les « règles régulatrices » et les « conventions » qui rythment le quotidien des établissements universitaires.
Nous avons eu le plaisir de discuter le 19 septembre dernier (Congrès de l’UPPA) de la charte de l’expression publique des personnels de la recherche de l’UPPA, que notre comité a proposée suite à l’avis du Collège de déontologie du Ministère de l’Enseignement supérieur et de la Recherche du 29 mars 2024.
Les questions et remarques ont été nombreuses et très pertinentes. Aussi, nous soumettons ce mois-ci une version améliorée à tous les chercheurs et enseignants-chercheurs de l’établissement via la messagerie interne pour débat au sein des différentes unités et appropriation des principes présentés dans cette charte.
Nous avons constaté, lors de son élaboration, que nous nous référons souvent à des lois nationales alors que les universités, telles que l’UPPA, sont régulées par des règles et des conventions propres à chaque établissement.
Pour s’y retrouver, développons un exemple introduit par John Searle [1] : celui du jeu d’échecs.
- Une « règle constitutive » concerne le déplacement spécifique des pièces (cavalier, fou, reine, pions...) ; sans ces règles, il n'y aurait pas de jeu d'échecs. Une telle règle s’applique à tous et elle est donc obligatoire. Par exemple, le fait de décerner un titre de docteur relève d’une règle constitutive de l’UPPA qui est donc contraignante.
- Une « règle régulatrice » est, par exemple, le fait de décider si l’on joue une partie « blitz » (10' par joueur), semi-rapide (20’ à 60’ par joueur) ou classique (1 h 30 par joueur). Une règle dite régulatrice est donc à définir, par débat démocratique, par exemple au sein de chaque unité de recherche ou école doctorale. Ainsi, certaines thèses de doctorat peuvent être par articles et d’autres monographiques. Le titre décerné est le même, mais la discipline définit la régulation du contrôle des compétences acquises.
- Une "convention" fixe par exemple la couleur des pièces du jeu d’échecs. La couleur des pièces pourrait bien être jaune et verte sans affecter en rien le jeu d'échecs ; et elles étaient blanches et rouges durant des siècles. Tout dépend ici du « système social » dans lequel on joue. Les conventions sont plus souples que les règles, et souvent définies entre acteurs.
La convention scelle un accord tacite ou explicite qui règle le comportement des deux parties. Ainsi, un directeur de laboratoire peut annoncer que, par convention, il associera ou non ses collaborateurs à un de ses futurs articles. L’implicite, en la matière, est à déconseiller.
N'abusons pas des règles régulatrices, car elles ne doivent servir qu’à transformer les valeurs collectives en protection commune quand cela s’avère nécessaire. Sinon, les conventions et le bon sens suffisent amplement à satisfaire l’impératif d’intégrité académique.
N’hésitez pas à nous poser vos questions ; nous y répondons sans faute !
Très cordialement,
Michelle Bergadaà et Isabelle Chol
Pour le Comité d’éthique, de déontologie et d’intégrité scientifique de l’UPPA
- Searle, J. R. (1969). Speech Acts. An Essay in the Philosophy of Language, Cambridge University Press ; Searle, J.R. (1995). The Construction of Social Reality, Allen Lane.